Le car nous emmène à présent visiter les monuments de la place principale de Mexico : le Zocalo.
Son nom officiel est la "Place de la Constitution" mais elle a gardé le nom de "Socle" en souvenir de celui qui était destiné à recevoir une statue de l'Indépendance jamais construite faute -dit-on- d'avoir pu choisir quelle personnalité servirait de modèle à l'œuvre...
Le plus amusant c'est que, depuis, toutes les places principales des villes importantes du Mexique portent le nom de Zocalo !
C'est là que se dressaient jadis les palais des rois aztèques : d'ailleurs les conquistadors espagnols ont réutilisé les pierres des anciens édifices démolis sous les ordres de Cortez pour construire, notamment, le Palais Présidentiel. Quant à la cathédrale, elle a été construite sur les ruines de la pyramide double de Tenoctitlan... tout un symbole !
Le Zocalo est la deuxième place du monde en superficie (après la Place Rouge de Moscou) mais nous auront du mal à en apprécier la dimension et la beauté : au centre de l'esplanade se dresse un hideux pavillon-musée temporaire orangeasse, monté à l'occasion de l'anniversaire du bi-centenaire de l'Indépendance et du centenaire de la Révolution qui doit être fêté en septembre (d'ailleurs toutes les villes mexicaines affichent des panneaux lumineux avec le décompte des jours et des heures qui conduisent à cet événement...) et tous les espaces verts sont en travaux !
De plus, on arrive en pleine manifestation pro-Zapata (me semblait qu'il était mort, pourtant...)
LE PALACIO NACIONAL
A l'est de la place, le Palais présidentiel étale sa façade de 200m de long, faite de pierres volca-
niques et de balcons en fer forgé. Il abrite le siège du gouvernement et -surtout- une magnifique collections de fresques murales.
En haut de l'entrée principale, la cloche de la Liberté que le président sonne chaque année dans la nuit du 15 au 16 septembre en criant « Mexicains, vive le Mexique ! Vivent les héros qui nous donnent patrie et liberté », reprenant ainsi l'exhorte prononcée par le Père Miguel Hidalgo en 1810 (rien à voir avec un quelconque entraîneur de foot.) Bon, il avait dit aussi à l'époque : « A mort les Espagnols ! », mais de nos jours, on évite, ça pourrait contrarier...
Une des 14 cours intérieures (le troisième étage a été rajouté en 1927)
Nous empruntons le grand escalier pour aller admirer les fresques allégoriques de Diego Rivera, peintre mexicain de renommée internationale, artiste engagé pour qui un homme barbu peint en haut d'une fresque et tenant des documents écrits, ce n'est pas Dieu tenant les Tables de la Loi mais Marx avec son Manifeste du Parti communiste... D'ailleurs il a fait scandale aux USA en peignant Lénine sur une fresque du Rockefeller Center à New York, ce qui lui a vallu la destruction de l'oeuvre par ledit monsieur Rockefeller !
Ardent défenseur du peuple et des cultures indiennes dont il avait une profonde connaissance, Rivera a souhaité peindre l'histoire du Mexique dans le but d'éduquer les populations analphabètes, raconter en images pour informer les gens sur leurs racines et l'évolution de leur nation en reprenant la technique de la détrempe déjà utilisée par les préhispaniques... Ces peintures sont d'ailleurs pour nous une parfaite illustration de tout ce que nous avons appris ce matin au musée d'Anthropologie.
La fresque centrale qui orne les murs de l'escalier a ainsi pour nom " Histoire du Mexique de la Conquête à 1930." Elle a été peinte sur 450 m2, entre 1929 et 1945 : donc en 16 ans... selon Saul, c'était un artiste qui s'éparpillait beaucoup !
Tout en haut de la fresque, les révolutionnaires célèbres Emiliano Zapata à gauche et Pancho Villa à droite (de son vrai prénom Doroteo... c'est vrai que ça fait moins révolutionnaire !)
A gauche de l'escalier, une fresque sur la lutte des classes (rien à voir avec mon école...) dominée par Karl Marx.
En bas de cette fresque, on reconnait sa femme Frida Kahlo, peintre de talent également, et au premier plan sa maîtresse, la soeur de sa femme... quand je vous dis qu'il s'éparpillait !
A droite de l'escalier, une représentation du roi toltèque Quetzalcoatl qui est mort et monté au ciel en promettant de revenir... ça ne vous rappelle personne ?
Cette légende aztèque est d'importance : en effet, ce roi est toujours représenté blanc et barbu sur les bas-reliefs des temples, contrairement à tous les indiens de l'époque. Après avoir fauté suite à un complot (ses ennemis l'avaient drogué et il a fait des bêtises... mais là les infos diffèrent : soit il a séduit la soeur de son ennemi Tezcatlipoca alors qu'il avait fait voeu d'abstinence, soit il a volé le cacaoyer pour le donner aux hommes... perso, je trouve ce péché-ci tout à fait pardonnable!), il s'enfuit de Tula vers le Golfe du Mexique et s'immole par le feu avant de devenir étoile, non sans avoir prévenu qu'il reviendrait entouré de papillons en rapportant à son peuple tous les trésors du Paradis, lors d'une année placée sous le signe du Roseau...
Or, à l'an 1 du nouveau cycle aztèque du Roseau, Hernan Cortez, blanc et barbu, arrive avec ses navires aux voiles blanches (qu'il fait brûler pour signifier à ses marins qu'il n'y aurait pas de retour), accompagné d'animaux inconnus (les chevaux) et d'armes très sophistiquées, vêtu d'une armure étincelante semblable à des écailles de serpent et coiffé d'un casque de plumes...
La coïncidence avec la prophétie est troublante et la confusion des rois aztèques compréhensible... ce qui a beaucoup facilité la Conquête ! (c'est de la triche... à moins que Cortez ne fût vraiment Quetzacoatl ?)
Le corridor extérieur est orné d'autres superbes fresques plus récentes de Rivera sur la vie des civilisations préhispaniques.
Le marché de Tlatelolco (avec au loin la ville de Tenochtitlan, ancienne Mexico)
Détail de la fresque (une déesse qui aime bien manger de l'humain)
Autre détail : le profil maya à la Pakal...
Sur cette peinture, on peut voir les loisirs de l'époque : jeu de Balle, du Volador, danses, sacrifices...
Les pyramides sont peintes en trompe-l'oeil : quand on se déplace on a l'impression de les voir toujours de face !
Là , je me tiens à droite de la fresque... étonnant, non ?
Rivera, sur cette fresque, a voulu montrer le futur métissage du pays après la Conquête : Cortez est flanqué de sa maîtresse indienne (une très jolie princesse vendue comme esclave surnommée "la Malinche" qu'il a utilisée comme interprète et conseillère avant de la donner à un de ses compagnons...) qui porte sur son dos son fils aux yeux bleus. Cortez insistera auprès de ses hommes pour qu'ils prennent comme épouses les filles des dignitaires aztèques de l'Ancien Empire. Les enfants de ces unions seront les premiers représentants de la Nation mexicaine...
Nous finissons la visite par l'ancienne Chambre des Députés (trop petite aujourd'hui)
LA CATHEDRALE METROPOPLITAINE
C'est la plus grande cathédrale d'Amérique latine, construite dès le XVIe siècle sur plus de 200 ans (encore des artistes qui s'éparpillaient !!!!) d'où la juxtaposition de plusieurs styles architecturaux.
Ses nefs font 100m de long sur 45m de large et elle possède 14 chapelles intérieures.
Elle est constamment en réfection car elle s'affaisse de 8cm par an à cause du sol instable de la ville (elle commençait déjà à s'enfoncer avant la fin des travaux de construction !) et présente de nombreuses fissures du fait de séismes répétés.
A l'intérieur, une grande partie de la cathédrale est fermée (je n'ai pas bien compris si c'était pour travaux ou à cause d'un office religieux) et nous ne pouvons pas accéder au Retable des Rois. On reste donc punis derrière les barrières en pleurant (on va d'ailleurs être souvent punis au cours de ce voyage...)
Si vous avez l'impression que le sol penche vers la droite sur cette photo, dites-vous que ce n'est pas (qu)un effet de perspective : ça penche vraiment !
Nous nous contentons donc du Retable du Pardon (avec son christ noir à droite).
Et des grandes orgues.
LE TEMPLE MAYOR
Un peu de temps libre pour faire le tour de la cathédrale et s'imprégner de l'ambiance de la ville en ce dimanche de marché noir de monde.
Voici la carte du secteur où nous avons pu admirer :
L'artisanat typiquement touristique
De belles façades...
... dont certaines très joliment fissurées
L'originalité des bancs et la carrure des Mexicaines...
Une partie des ruines du Templo Mayor (le reste des pierres a été utilisé pour construire la cathédrale)
De nouveau, un Pow Wow pour Norbert !
Enfin... des danses aztèques on va dire, et entièrement d'époque... (je me moque mais peut-être les danses préhispaniques se sont-elles perpétuées chez les descendants métis de ces peuples ?)
Avec de vrais nindiens aux tambours !
Des cérémonies d'exorcisme moins onéreuses que les visites chez le médecin...
Et des marchandes de Tacos, miam, miam ! (comme nous pourrons le constater, ce que Saul confirmera, les Mexicains n'ont pas vraiment d'heure de repas, ils mangent toute la journée...)
Nous reprenons le car pour nous rendre sur la place Garibaldi en longeant la très jolie façade du Palacio de Correos (la Poste, quoi) aux ornements architecturaux inspirés de la Renaissance italienne.
On se croirait à Venise !
LA PLACE GARIBALDI
La Place Garibaldi est célèbre pour être le repère des dangereuses bandes de Aïe Aïe Aïe qui, armés de trompettes, énormes guitares et autres instruments de mort musicaux, attendent, la tête fière et le ventre rentré, les clients qui viendraient louer leurs sévices... euh, services pour animer une soirée privée (mais non, je n'ai absolument pas été traumatisée par les Cucarracha, Guadalajara, Bamba et autres succès récurrents qui nous ont régulièrement rendus sourds pendant nos repas...)
Ils sont bien là, dans leurs seyants pantalons moulants (le jeu consistant à placer le ventre quelque part autour)
Un habit clair ? Ce doit être le chef de la bande...
Ils sont partout, mêlés à la population, prêts à bondir sur leurs trompettes...
Heureusement, je vous donne un indice pour les reconnaître : ils se cachent habituellement sous une coiffe discrète leur permettant de se camoufler aisément...
Oui mais... le Mexique ne serait pas le Mexique sans les Mariachis !
Nous arrivons au terme de ce premier jour plein de découvertes... 4 articles pour une seule journée et 1 mois pour les rédiger : je me demande si je vais arriver au bout de ce reportage un jour ! (j'ai un aveu à vous faire : je m'éparpille, moi aussi...)
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